PILOTE PRIVE

J’ai oublié la check-list avant décollage

Le pilote commente son vol :

Après une navigation de 1h, en fin de journée, à 1h environ de la nuit aéronautique, je décide  de me poser sur un aérodrome où les touch-and-go sont interdits aux avions non basés. Cet aérodrome a été fermé de longs mois pour refaire la piste. Je ne m’y suis pas posé depuis longtemps et profite de l’occasion pour tester la nouvelle piste.

A l’atterrissage, je suis surpris de sa qualité. Je m’attendais à me poser sur un billard et il y a des rugosités, qui m’étonnent. Je fais demi-tour pour remonter la piste: il y a des gravillons.

Des aéromodélistes  se livrent à leur activité à côté de la piste. Je n’avais pas vu leurs avions quand j’ai fait ma verticale. Certains regardent mon appareil. Je ne sais pas si c’est de la surprise ou de la curiosité. Je n’ai pas vu de NOTAM ni de signe piste fermée sur l’aire à signaux mais j’ai un doute: la piste est-elle ouverte.

L’heure tourne et je sais qu’il faut rentrer. Je décide donc une fois la piste remontée de décoller. Je l’annonce à la radio. Je vérifie trop rapidement les paramètres de tête sans lire la check-list (ce que je fais habituellement systématiquement au point d’arrêt), un peu comme si j’avais remis les gaz sur un touch que je n’ai pas pu faire. En fait, à cause de graviers, j’avais rentré les volets. Et j’avais aussi oublié d’enlever le réchauffage carburateur.

Je décolle donc sur une piste de moins de 800m, sur un 120cv, avec réchauffage carburateur et sans volets. Je trouve que l’avion peine à prendre de la vitesse. Il finit par décoller. Je ne tire donc pas trop sur le manche et cherche à comprendre. Je me rends compte que je n’ai pas mis les volets quand je veux les rentrer à 300ft sol que j’ai peiné à atteindre. Je suis troublé de ma faute et interrompt ma procédure. Quand je reprend mes esprits je me rends compte que j’ai aussi laissé le réchauffage carburateur !

Je me suis finalement posé au coucher du soleil, soit 30mn avant la nuit aéronautique. Je n’avais donc aucune raison objective de me presser au point de ne pas lire la procédure ! J’ai été préoccupé par plusieurs facteurs qui ont diminué mes capacités d’analyse: état de la piste, piste fermée depuis de longs mois, curieux, heure tardive… De retour, à la maison, j’ai pu revérifier que la piste était bien ouverte, pas de NOTAM et que c’était à cause de mon naturel anxieux qui était  ressorti suite à mon stress (facteurs humains).

J’ai depuis pris la ferme résolution de toujours réaliser l’ACHEVER pour ne pas oublier d’éléments vitaux lors du décollage.

Analyse

Nous pouvons retenir plusieurs facteurs intéressants dans le récit de ce pilote. Si nous les prenons chronologiquement nous avons  : J’ai un doute : la piste est-elle ouverte ? L’heure tourne et je sais qu’il faut rentrer. Je vérifie trop rapidement les paramètres. … à cause de mon naturel anxieux qui était  ressorti suite à mon stress.

Voici maintenant quatre vulnérabilités, ou fragilités, auxquelles ce pilote à sans doute été confronté, avec plus ou moins d’intensité :

Le stress est intense et vous n’arrivez plus à vous concentrer. Vos capacités mentales sont aspirées dans un puits sans fond. Une simple réflexion nécessite une importante énergie mentale, vous vous focalisez sur des détails aux dépends d’autres tâches. Pensez à reboucler vos tâches de surveillance autour de vos priorités.

Le niveau de lucidité va conditionner la qualité de la conscience de la situation. Sous l’influence du stress votre « radar mental » voit sa puissance diminuer : la taille de l’image mentale se réduit (anticipation insuffisante) et sa qualité diminue (perte de lucidité, défaut de vigilance…).

Un symptôme particulier du stress est l’impression de rétraction du temps. Il n’est pas spécifique au stress rencontré par les pilotes, par contre cela devient critique quand on sait que le calage en temps réel du pilote sur sa situation dans l’espace temps est primordial. Même si le décalage semble être dans le bon sens, il est source d’erreurs, de surcharge mentale, de stress supplémentaire.

  • Erreurs 

Sous l’influence du stress, le pilote éprouvant des difficultés à se concentrer, va commettre des erreurs. Concentrez vous sur vos tâches et plus particulièrement sur les tâches les plus critiques : gestion carburant…

Une procédure est un verrou qui vous garantie une situation précise une fois celle-ci effectuée. Ne pas la suivre, la modifier, l’oublier, c’est laisser la porte ouverte à de potentiels ennuis.

REX n° 146 de la FFA (avion) publié avec leur aimable autorisation.

Daniel La Ferté

 

Article précédemment publié le 31 mars 2013.

Photo ci-dessus de Daniel.

Bons vols

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