Nos capacités sont limitées. Si notre potentiel est par exemple de 100, au cours de nos premières leçons de pilotage 90 ou 100% de nos ressources seront engagées pour tenter de maîtriser notre appareil. Après quelques heures de vol, les routines de pilotage en place, nous récupérons de la disponibilité pour effectuer nos check-lists, faire la radio… tout en pilotant. Pour utiliser une image, nous avons zippé ou compressé une partie de nos ressources dédiées à telle ou telle tâche ; et notre instructeur pourra alors continuer à “charger la mule” dans ce nouvel espace disponible.
Mais Isabelle SANTOS, à propos d’une expérimentation, confirme que le fonctionnement du cerveau humain peut-être qualifié de « canal unique », c’est-à-dire qu’il ne peut faire bien qu’une seule chose à la fois ; le terme « bien » est ici particulièrement important. Ne vous laissez pas rebuter par le paragraphe sur les voxels, c’est la partie la plus intéressante.
« Bien malins ceux qui pensent, malgré les consignes de sécurité, être capables de tenir le volant d’une main, le téléphone mobile de l’autre. Il n’en est rien. Une étude réalisée aux Etats-Unis vient de le confirmer : le cerveau, malgré sa capacité d’abstraction et d’adaptation, ne peut assurer deux tâches à la fois.
Les activités cérébrales en compétition
Des études avaient déjà prouvé que quand une seule zone, par exemple le cortex visuel, doit répondre à deux sollicitations simultanées – comme suivre deux objets des yeux à la fois –, l’activité est moindre que s’il se concentre sur un objet à la fois. Mais, en est-il de même lorsqu’il s’agit de zones cérébrales différentes ? La réponse n’était pas évidente. En effet, on pouvait penser que des tâches différentes, activant deux zones distinctes du cerveau, s’effectuent de façon indépendante. Or, l’étude de Pittsburgh montre que cela entraîne une sorte de compétition dans l’espace cérébral. Dix-huit volontaires soumis au scanner ont permis de visualiser que les points « chauds » ne se multiplient pas en fonction des sollicitations.
Pour le cerveau, un + un n’égale pas deux…
Au cours du premier test, les volontaires devaient écouter une phrase et se prononcer sur sa véracité. Dans le test suivant, il leur était proposé de faire tourner mentalement des images en trois dimensions et de les comparer afin de déterminer si elles étaient identiques ou non. Après avoir réalisé chacune des tâches séparément, les volontaires devaient faire face aux deux à la fois. À l’issue de ce dernier test, les chercheurs confirment que chaque tâche se loge dans une aire du cerveau. Le langage seul active 37 voxels de tissu cérébral, principalement localisés dans les zones temporales. Pour l’exercice de visualisation, on compte, de même, 37 voxels. Cependant, si l’on exécute les deux exercices en même temps, les voxels ne s’additionnent pas. On ne compte plus que 42 voxels au total ! Soit seulement 5 voxels supplémentaires.
Accepter ses limites
Tout le monde s’est essayé à faire deux choses à la fois. Par exemple, parler à un passager et tenir le volant. Certes, conduire comme parler peut résulter d’un automatisme qui n’exige pas une grande puissance cérébrale, mais lorsqu’un conducteur expérimenté doit faire face à une soudaine augmentation de la difficulté, telle une pluie battante, il interrompra certainement sa conversation pour se concentrer sur la route. La différence entre parler au téléphone et converser avec un passager est que celui-ci peut évaluer la situation et probablement se taire de lui-même. L’utilisation d’un système mobile, qui permet de garder les mains libres, ne résout en rien le problème de l’incapacité du cerveau à faire face à deux activités complexes à la fois. Il faut donc bien comprendre que le cerveau a des limites. Même si nous avons tous l’illusion que se dédier à plusieurs choses à la fois, et en vitesse constitue le futur défi de notre chère tête ! »
Isabelle Santos
Les commentaires de MentalPilote
Si un pilote devait effectuer toutes ses tâches de manière séquentielle sans les interrompre ou les superposer à aucun moment, il y aurait de nombreux domaines à revisiter du côté des procédures et de leur certification… Seules quelques rares séances de simulateur, et encore, permettraient peut-être de dérouler une partition parfaite. Alors que régulièrement, trop régulièrement parfois, le pilote effectue plusieurs tâches simultanément. Donc, avec un risque potentiel qu’une de ces tâches ne soit pas correctement effectuée, sans qu’il ne s’en aperçoive. C’est alors l’apparition d’un écart ou d’une erreur (erreur = écart important).
Suivant le concept du « canal unique », amusons nous à compter le nombre de procédures à effectuer dans un vol, chacune d’entre elles va se subdiviser en tâches, chaque tâche en actions, et les actions entraînent des vérifications, et les vérifications entraînent des vérifications croisées, etc… Le « canal unique », c’est un tuyau, or il existe des moments où le débit des actions à effectuer est trop important pour la section du tuyau qui elle est limitée (charge mentale). René AMALBERTI parle alors de « goulet cognitif ». Dans 50% des accidents (TP), l’équipage est confronté à un problème de débit trop important.
Comme beaucoup d’accidents on se retrouve dans le cas de pannes multiples ou confuses, ou l’équipage dans des conditions de stress, n’arrive pas à trier les informations (de très nombreux exemples m’ont montré que bien souvent on traite la panne qui n’a aucune priorité et on perd un temps précieux sur celle qui nécessite une décision et action rapide.
Or, il semblerait que le cerveau va à la facilité en traitant en premier la panne mineure (donc la plus facile à traiter)
Je suis aussi toujours surpris, que lors d’une panne, l’homme a tendance à perturber la machine au lieu de garder les paramètres affichés aux manettes.
Une chose me parait évidente, est le fait qu’avec la technologie et les aides au pilotage de plus en plus pointues, le cerveau parait avoir bien des difficultés à revenir aux fondamentaux (par exemple, assurer un pilotage avec la boule et la bille en cas de perte des éléments fournis par les calculateurs).
Tout cela est un manque de cohérence. Or, cela est dû au stress qui joue sur le rythme cardiaque et sur tout un tas de chose “physiques” mais aussi le sur “psychique”, avec atteinte sur les neuro-transmetteurs. On a alors beaucoup de mal à sa rappeler de quoi que ce soit
Or bizarrement, le “stress” ne se lit pas toujours sur le visage ni ne s’entend dans la voix.
Souvent, tout semble normal,( je suis calme, mais je ne me souviens de rien du tout. J’ai l’impression que mes membres ne font pas ce que mon cerveau lui commande)
De plus la “panique” se communique très bien.
Bonjour,
> Oui, c’est un peu la même idée que je voulais évoquer, le stress vous fait oublier tout un tas de chose… Le cerveau est rempli à bloc mais incapable au moment du stress de discerner…Mieux c’est le vide total, on ne sait plus ce qu’il faut faire, on ne se rappelle plus rien…
> A lire l’article, on aurait l’impression que le pilote se doit de se comporter tel un robot, faire tout dans l’ordre sans s’éparpiller, se dissiper…Un peu comme s’il était lui-même un ordinateur à fortiori
Pour Bob, si tu veux en savoir plus tu vas dans la partie formation et tu ouvres les fiches stress. JG