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Le lâcher d’Adrien

Adrien nous a envoyé un commentaire à propos de son premier vol en solo. Le sien ne s’est pas bien passé et il nous le raconte. Voici donc son retour d’expérience avec quelques remarques qui pourraient intéresser les futurs lâchés ainsi que les instructeurs.

J’aurais aimé que mon premier vol solo se passe comme ceux qui l’ont raconté sur votre site. Malheureusement ça ne s’est pas passé si bien que ça. J’avais un peu plus de 13h de vol quand mon instructeur après quelques tours de piste m’a dit de continuer tout seul. Je m’y attendais un peu mais peut-être pas ce jour là. Je ne sais pas ce qui s’est passé mais j’ai été sacrément refroidi. Quand il est sorti de l’avion j’ai commencé à stresser, est-ce que je vais y arriver, est-ce que je ne vais pas oublier un truc, mal arrondir. Quand j’ai fait mes vérifications avant de décoller, j’avais beaucoup de mal à me concentrer. J’ai fait un ou deux zig zag au décollage. En vent arrière j’ai essayé de me concentrer. Ca na visiblement pas marché, j’ai fait un gros rebond à l’atterrissage. Mon instructeur m’a dit que je n’avais pratiquement pas arrondi et qu’en voyant le sol arriver j’avais trop tiré sur le manche et trop tard. Ca s’est bien terminé pour l’avion, pas pour moi. Je me demandais vraiment ce que je faisais là. Mon instructeur a essayé de relativiser les choses mais moi j’avais eu chaud. Il m’a repris en double et avec une interruption qui m’a obligé à me réentrainer j’ai été lâché après 17h de vol. C’était un peu un soulagement mais je n’ai pas connu la joie communicative des pilotes qui racontent leur premier solo sur votre site. Voilà l’histoire. Il y a des choses intéressantes dans l’article, faire les choses les unes après les autres sans se prendre le chou avec l’atterrissage c’est ce que je retiens.

Commentaires

Adrien est aujourd’hui lâché et il n’a plus à priori de problèmes pour arrondir. La différence entre le premier lâcher et le second vol en solo c’est une compétence qui s’est forgée avec les heures de vol et qui du coup devient beaucoup plus robuste aux menaces externes, ou internes comme celle à laquelle Adrien a été confrontée : le stress.

On ne lâche pas un élève après un bon tour de piste, on le lâche après plusieurs séries de bons tours de piste. D’une part pour avoir des certitudes quant à la réelle capacité de l’élève à voler seul, c’est quand même indispensable, et d’autre part pour avoir une marge de sécurité au cas ou … Au cas ou un petit vent de travers se lève, un changement de piste imprévu… Son absence d’arrondi fait penser à un symptôme de stress extrême, il n’était plus dans l’avion, avec notamment un pilotage heurté qui est un symptôme également de stress.

Je ne sais pas si Adrien est d’un naturel anxieux ou pas ? Instructeur, on perçoit en général quelques signaux de nervosité ou d’anxiété, on en discute avant le lâché si on a un doute ou pour tenter de relativiser les choses en s’appuyant sur ses prestations pour lui transmettre de la confiance en soi : « Ça c’est super bien passé, tu fais le même chose ». Un pilote doit percevoir son réel niveau de compétence, débutant il n’est pas forcément le mieux placé pour l’analyser. C’est là que l’instructeur a son rôle à jouer et il ne doit pas hésiter à faire du renforcement positif sur les capacités de son élève(sans en rajouter bien sur).

Il peut y avoir des cas plus pernicieux. Certaines personnes particulièrement anxieuses développent des stratégies, conscientes ou inconscientes,  destinées à masquer leurs symptômes de stress. L’instructeur pense avoir un élève solide nerveusement alors que ce n’est pas le cas et que ce dernier sera susceptible de voir ses capacités se liquéfier face à l’imprévu. J’ai rencontré un élève comme ça. Le mien, il n’a même pas réussi à décoller ! Il était tétanisé (au moins les pieds !) : lors de sa course au décollage il est passé de la piste en herbe à la piste en dur avec un Rallye ! Tout s’est bien terminé, le terrain était grand. Un message à Adrien : autour de moi je ne connais aucun pilote qui n’ait pas fait un rebond.

S’il y a une leçon à retenir c’est qu’il faut trouver le jour du lâcher la bonne adéquation entre le niveau de l’élève d’un point de vue purement technique (ce que l’instructeur perçoit en double commande) et ses capacités à faire face à certaines émotions (le premier solo et le cas échéant des imprévus). En cas de doute les quelques heures de double supplémentaires ne seront jamais perdues. Quelques échanges entre l’élève et son instructeur avant le lâcher doivent permettre de trouver plus précisément ce bon moment.

Bons vols

2 Comments

  1. Olivier

    Bonjour,
    Je comprend tout à fait cette anxiété du 1er lâché. Lorsque le jour de mon lâché fut arrivé, mon instructeur m’a demandé si je me sentais prêt. Ma réponse fut non. J’ai eu alors le temps de me préparer mentalement à cette expérience, de bien passer en revue toutes les phases de l’atterrissage.

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  2. Ronan

    Hello,
    Il me semble qu’il y a un autre article qui parle de stress intense en solo…et j’en sais quelque chose vu que la personne dans l’article, c’est moi.
    J’ai été breveté PPL depuis, j’ai fais quelques vols avec des amis qui n’ont aucunes notions de pilotage, ainsi que ma copine; qui se sont extrêmement bien passés.Je ne sais toujours pas le pourquoi du comment en revanche….

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