1 ère Partie
« Votre finale a été très régulière et vous avez pu constater que vous êtes resté avec les aiguilles au centre… mais cela était dû à un écart involontaire non détecté : votre instrument est resté sur OFF, position sur laquelle l’aiguille reste au milieu ». Vous pouvez imaginer mon désarroi lors de l’instruction de ce jeune (il y a quelques années) mais bien vite corrigé car je lui ai fait refaire sa percée et cette fois, tout était bien ! Un « bravo » de ma part a fini de le remettre dans sa réussite tardive.
Apparaissant comme un laboratoire permanent dans l’étude de l’erreur, l’aviation est au centre de tous les chiffres rassurants ou inquiétants, véritables statistiques de l’espoir ou de son contraire ! Que n’a-t-on entendu lors des innombrables débats de grands penseurs ou décideurs, par leur position ayant autant de responsabilité dans ces échecs que toute personne déviante (les statistiques aéronautiques pointent tout de même les erreurs de management dans 80% des accidents aériens des vingt dernières !) Notons quand même que la bonne gestion des dirigeants et une parfaite organisation peuvent réduire les accidents mais ne peuvent en aucun cas complètement les empêcher !
La CRM (Crew Resources Management) a permis dans un premier temps de sensibiliser les acteurs des compagnies aériennes aux phénomènes cognitifs et collectifs qui conduisent aux erreurs de pilotage par la représentation de quatre grands types d’erreurs : Attention, transgression, connaissance et enfin compréhension. Cette dernière peut être la plus intéressante à étudier mais aussi la plus difficile à prévoir.
Dans un deuxième temps, elle a permis de lutter contre leur nombre en travaillant sur la réduction volontaire des écarts et biais grâce à l’utilisation de toutes les méthodes possibles : cross check, communication…
La CRM a donc permis de mettre en place des améliorations mais a créé une sorte de « nombrilisme « sur le cockpit. Ainsi, l’application des règles et procédures a été favorisé au détriment de la recherche et de la compréhension de l’origine des écarts.
L’erreur a pour principal défaut de ne pas avoir d’importance par sa nature mais par la situation dans laquelle elle s’inscrit. Nous sommes au cœur d’une action sans pour autant être toujours sûrs d’avoir bien conscience de la situation et nous utilisons quotidiennement des raccourcis pour gérer nos ressources : les heuristiques nous permettent ainsi de conduire tout en étant pris par quelque activité simple (allumer une cigarette en conduisant par exemple…) Notre vie est ainsi pleine d’erreurs souvent rattrapées et sans conséquence manifeste. Nous bloquons parfois des incidents avant qu’ils ne deviennent des accidents, contrôlons implicitement notre comportement et cherchons en permanence à nous adapter.
Apparaissant sous plusieurs formes, les erreurs peuvent être classées en groupe ou particularismes.
Prenons comme exemple, l’erreur de fixation qui fait agir l’individu de manière prolongée ou répétitive alors que cette même réaction n’est de toute évidence pas adaptée à la situation. Ceci s’explique par « une panne du mécanisme de conscience » qui contrôle habituellement la très importante conscience de la situation. L’enfermement dans une hypothèse fausse et maintenue, qui amène même l’acteur à ne pas douter de son comportement devant l’échec répété, est produite par les signes d’émotion ou de stress (sentiments).
Prenons pour imager celle-ci, l’exemple d’un équipage qui pris par une recherche de solution technique suite à une panne oublie de vérifier son autonomie carburant restante et va finir en plané moteurs arrêtés.
Tranquillement assis, il nous parait facile de comprendre à la lecture de cet exemple que nous pourrions classifier sans problème chacune des situations apparentes dans les rapports d’accident. Pourtant, n’oublions pas que le plus difficile dans un processus de gestion d’erreur est l’identification de celle-ci ! Malheureusement pour nous, aucun dispositif greffé aujourd’hui dans le cerveau humain ne peut traduire par une alarme et des impulsions électriques la survenue évidente, bête et méchante d’une magnifique (énorme erreur ». Les signes précurseurs sont malheureusement discrets, amplifiés par une situation, mal analysés, déficients et/ou même effectués volontairement en toute bonne foi par notre esprit aidé en cela par nos mauvaises habitudes, réflexions non adaptées ou tout simplement notre caractère borné…
Ainsi donc, les erreurs seraient normales et régulières mais quasiment tout le temps rattrapées.
Pourtant, ne peut on pas mettre en place des moyens d’amélioration de leur gestion ou favorisant leur détection ?
D’un côté les constructeurs conçoivent ou améliorent des systèmes permettant la réduction de la charge de travail et une amélioration de la sécurité, de l’autre les compagnies en profitent pour exploiter les PN, que ce soit au niveau des horaires, de la pression ou le la fiche de paie. Quant à l’avenir, la technologie va surement permettre la certifications des futurs appareils en monopilote.
A moins de faire évoluer les règles, il y aura toujours cette contrainte économique incompatible avec la sécurité.
Je ne suis pas expert mais ce commentaire me surprend un peu. Pour moi, cela devrait rester 2 PN ou alors…aucun. Il est déjà possible même avec l’ergonomie actuelle des postes de pilotages d’assurer en “mono pilote” et de bout en bout la conduite du vol des avions de ligne. On pourrait même, immédiatement, adapter cette ergonomie pour qu’elle convienne parfaitement à un seul pilote. Mais, tant que la conduite des vols ne sera pas totalement automatisée “façon drone”, le problème restera toujours que le second pilote s’impose en raison des incontournables faiblesses des facteurs humains : notamment risques de mort brutale ou de défaillance pendant la fonction, augmentation des risques d’erreur générée par la surcharge de stress et de travail inhérente à l’absence du second pilote, etc.