La carte… Un outil indispensable pour le pilote, que ce soit pour sa sécurité, ou pour la préparation et la bonne exécution de ses vols. La carte n’est pas un simple morceau de papier. C’est une mine d’informations pour qui sait correctement la déchiffrer. Elle possède aussi une grande part de mystère, ce qui la rend fascinante.
Les premières cartes aéronautiques que nous avons rencontrées au début de notre formation nous ont tous laissés perplexes. Quel est ce symbole ? Que signifie-t-il ? Puis après des heures de lecture, de déchiffrage, de questions posées à différents instructeurs, on commence à comprendre les différents symboles et les informations importantes associées. Alors on se rend compte de tout ce qu’une carte peut nous apprendre.
Un pilote exploite un très grand nombre de cartes, toutes différentes les unes des autres, chacune correspondant à une phase de vol en particulier. Les cartes TEMSI et WINTEM vont être utilisées lors de l’établissement du dossier météo, et vont permettre de prendre la bonne décision concernant le vol : Go ? No go ? Go en prenant une route différente pour contourner le mauvais temps ? Go mais en retardant le départ pour laisser passer un front ? Quoi qu’il en soit, les cartes météo vont orienter notre stratégie de vol et vont représenter la situation que nous sommes plus ou moins susceptibles de rencontrer une fois en l’air. J’insiste bien sur le « ou moins » car la seule météo qui compte est celle que l’on voit depuis le cockpit à l’instant t. Il faut toujours rester flexible et savoir changer de plan si la situation l’exige.
Bien évidemment, la carte de navigation papier (Celle de votre choix) est indispensable pour le pilote, s’il ne veut pas se perdre, survoler une centrale, ou bien pénétrer dans un espace aérien de classe A (pour un VFR). Le pilote rigoureux va suivre le trait qu’il aura tracé parmi tous les autres symboles imprimés sur le papier. Curieux, il sera peut-être attiré par un symbole particulier (château, lac…) et quittera volontairement sa route pour aller le survoler, en restant à tout moment sûr de sa position.
C’est aussi ça la liberté. S’il s’égare, il pourra partir à la recherche d’un VOR et de la fréquence associée pour avoir une idée de sa position (flanquement). Ou bien il cherchera une fréquence à contacter pour obtenir de l’aide. Grâce à la représentation du relief, il pourra déterminer son altitude minimale de survol et se fixer des marges. Avec les informations météo en plus (plafond, visibilité…), il saura quelle stratégie de vol adopter. A la fois utilisées pour les départs et les arrivées, les cartes VAC permettent quant à elle d’avoir une vue détaillée d’un aérodrome en particulier, avec le dessin du circuit de piste, les obstacles, et toutes les informations nécessaires afin de s’y poser ou de décoller (restrictions, consignes particulières…).
Une fois les cartes étudiées et avec de l’entraînement au fil des vols, il est très utile de savoir superposer la représentation carte et la vue extérieure. Par exemple, après avoir préparé une navigation, fermer les yeux et visualiser le parcours avec les différents repères successifs permettra au pilote de le mémoriser. Il pourra aussi imaginer la coupe trajet de la carte TEMSI (il devrait y avoir telle météo, tel plafond à tel endroit du parcours). C’est une méthode qui est d’ailleurs mentionnée dans le guide Aviation de Météo France, avec en exemple une grande navigation.
Une fois en vol, toujours le doigt sur le trait, il sera un peu plus en avance sur l’avion et pourra se focaliser sur ce qu’il se passe dehors. Il pourra également comparer la météo réelle avec ce qui était inscrit sur le papier et sera ainsi plus à même de détecter une incohérence. A l’approche de l’aérodrome de destination, la connaissance de la carte VAC lui permettra de visualiser le circuit de poste afin de ne pas se perdre pendant l’intégration. Il pourra ainsi constamment surveiller le trafic sans avoir besoin de plonger la tête dans le cockpit.
Les cartes papier sont-elles condamnées?
Ipad, glass-cockpit (EFIS), GPS… Ce sont les nouveaux moyens de navigation que l’on trouve à bord des aéronefs aujourd’hui. Ils remplacent petit à petit les moyens traditionnels et permettent une utilisation plus intuitive pour le pilote, ce qui est aussi une très bonne chose en termes de charge de travail. Le pilote peut lever plus facilement le doute sur sa position. Alors il passera peut-être plus de temps les yeux dehors… Peut-être ! Mais comme tout système électronique, il y a le risque de panne. Et la loi de Murphy nous dit que l’Ipad nous lâchera alors qu’on en a le plus besoin. C’est bien connu! C’est pourquoi il est vital encore aujourd’hui d’avoir une carte papier sous la main, prête à être utilisée en cas de besoin. Mais si elle est à bord, encore faut-il savoir l’exploiter de manière optimale, en sachant y trouver les informations pertinentes.
Bien que progressivement remplacée, la carte papier reste un outil indispensable pour le pilote. Elle le guide dans ses actions, ses décisions. Son utilisation est un art. Mais un art qui semble se perdre au profit de l’électronique. En effet l’aéronautique connaît de grands changements, notamment en matière de technologie, et il est possible d’imaginer que les futurs pilotes ne seront plus formés de la même façon. L’ADS-B (Automatic Dependent Surveillance-Broadcast) permet déjà aux Etats-Unis de recevoir, via un récepteur à bord de l’appareil et différentes stations au sol, un très grand nombre d’informations telles que la météo (TAF, METAR, vent en altitude, précipitations…) et les trafics alentours, entre autres. Ainsi, l’apprentissage de la navigation s’y trouvera probablement modifié. En attendant, faisons perdurer cet art et usons encore un peu de papier avant de le bannir complètement de nos cockpits.
Bons vols.
Breveté PPL, Alexandre s’intéresse de très près aux connaissances techniques sur le pilotage, aux facteurs humains… Il est actuellement contrôleur aérien en formation à Saint-Cyr-l’Ecole.