Chuck YEAGER
Il y a quelque temps un journaliste s’étonnait du comportement de Neil Armstrong – premier homme à avoir posé le pieds sur la Lune – qui fuyait les médias, la reconnaissance, les honneurs. D’autres pilotes, comme Jean Mermoz ou Charles Lindberg, étaient de la même veine. Si ces pilotes ont été promus au rang de héros par les médias, ces pilotes n’aspiraient professionnellement qu’à une chose : exercer leur métier, le regard des autres importait peu pour eux.
Nous retrouvons la même approche dans les propos de Chuck Yeager, le pilote qui a franchi pour la première fois le mur du son. Quand on lui parlait de héros ou des qualités que l’on attend chez les pilotes, il évoquait non pas le pilote qui avait pu accomplir un fait héroïque, mais il prenait en exemple le pilote inconnu qui monte dans sa machine, jour après jour, avec toujours le même niveau d’exigence, de rigueur, d’abnégation, pour effectuer son activité qui pourrait nous sembler bien banale. Mais voler est tout sauf banal, c’est le premier message que Chuck Yeager veut nous faire passer.
Il nous dit que voler nécessite un tel niveau d’implication, que maintenir ce niveau sans faille est héroïque.
Concernant ce pilote inconnu au fin fond de sa brousse, ce n’est pas un hasard si son analyse correspond parfaitement à un trait caractéristique du héros qui est de faire les choses gratuitement, anonymement.
Un vrai héros n’attend rien de son entourage lorsqu’il décide de traverser l’Atlantique pour la première fois. Un vrai héros c’est le premier qui décide de ne pas décoller alors que les conditions météorologiques deviennent défavorables. Un vrai héros c’est celui qui, fatigué après 12h de vol, peu avant son atterrissage va vérifier à nouveau le notam concernant une bretelle de taxiway fermée. Un vrai héros c’est ce pilote largueur qui en fin de journée après des dizaines de rotations, va faire l’effort de puiser encore un peu plus dans ses ressources afin de maintenir le bon niveau de vigilance.
Parce que l’activité est exigeante, c’est la motivation personnelle, comme le professionnalisme, l’accomplissement de soi, l’éthique… qui fournira suffisamment d’énergie pour rentrer dans la case des héros. Une motivation externe comme le regard ou de la reconnaissance des autres, ne suffit pas à atteindre ce niveau d’exigence.
Et bingo ! Quelle est la première qualité du pilote ? L’humilité.
Et re bingo ! Quel serait d’après Tony KERN (Êtes-vous un rogue pilot), le premier facteur accidentogène chez un pilote ? Son égo.
Tout se tient.
Les meilleurs pilotes seraient donc ceux qui ne la ramènent pas, qui n’ont pas besoin du regard des autres pour faire le job, et qui ne le recherchent pas.
Bons vols