New York-Paris, 3 h 15
Où commence et où s’arrête un voyage ? Pour ce New York-Paris, en mai 2003, le voyage commence au Meridien Parker de New York, le QG des équipages Concorde, 57e rue et 6e avenue. Au petit matin, New York est déjà réveillé par le son des sirènes des voitures de pompier. Mon Captain et mon officier mécanicien-navigant sont déjà là, tout sourire. À peine avons- nous mis les pieds dans la limousine qui nous mènera à John F. Kennedy Airport, que nous avons déjà l’impression d’avoir fait un premier pas sur l’Atlantique ! Arrivés à la préparation des vols, nous faisons une série de calculs indispensables pour anticiper toutes les pannes possibles, même mineures. La particularité du Concorde est que sa consommation distance est minimale lorsqu’il est à Mach 2 et au niveau de vol 600. Paradoxalement, plus il va vite et moins il consomme : à 60 000 pieds, il y a 60 hpa d’atmosphère, c’est-à-dire presque plus d’air, et donc presque plus de frottement ni de traînée. Si une panne mineure nous empêche d’atteindre Mach 2 et la très haute altitude avant la moitié du vol, alors nous n’aurons peut-être pas assez de carburant pour continuer et le demi-tour s’imposera. Concorde avance à vingt nautiques par minute ; trente secondes de réflexion coûteront deux fois 10 Nm, plus un virage de soixante nautiques de rayon ! Pour toutes ces raisons, la préparation d’un vol supersonique se fait au nautique près.
Le grand vaisseau blanc
Et puis nous voilà sur le tarmac, à faire le tour de l’avion, qui est aussi long qu’un 747 (62 m), et bien sûr moins large (26 m). Quand on inspecte l’avion et que l’on passe sous son aile delta néogothique, ça vous prend aux tripes. Concorde, c’est immense de grandeur et de beauté, c’est une œuvre d’art qui vous amène aux confins de l’absolu et de ce que l’homme peut faire de meilleur. Concorde, vu du dessous, c’est une cathédrale de lumière et de raffinement. Et de cela, on ne se lasse jamais.
Nous rentrons dans l’avion avec cette odeur indéfinissable et son cockpit fantastique où les centaines de cadrans et de lumières semblent nous accueillir dans leur chaleur et leur bienveillance. Dans ce cockpit on se sent bien, indéniablement bien, il n’y a nulle part sur cette planète où l’on peut se sentir mieux. Le cockpit est étroit mais confortable : une fois assis c’est comme si nous faisions corps avec la machine, comme un cavalier sur son cheval, un cavalier du xxe siècle entouré de cadrans, de voyants et de manettes. À partir de ce moment, où nous sommes tous les trois dans le poste de pilotage, tout s’égrène comme une musique fluide, les essais, les voyants, les alarmes, chacun sa partition. Autour de chaque départ, les mécaniciens-sol ressemblent aux équipes qui s’affairent autour des Formule 1 : ils ont réponse à tout. Et puis l’avion s’anime : « Air France 001, clear to push back and start, expect 31 left for take-off, Canarsie climb… »
Quatre Rolls-Royce Olympus 593
La mise en route des Rolls-Royce Olympus, c’est un son qui vous remplit l’âme. Les quatre réacteurs s’échauffent, ça y est, Concorde est vivant. Depuis le début du roulage, jusqu’au décollage, on ne s’arrêtera pas. Kennedy nous donne la priorité, on passe devant tout le monde, le coupe- file supersonique ! Deux raisons à cela, économiser du carburant et ne pas freiner : si la température des freins atteignait plus de 150 °C, nous serions en limitation. Nous roulons à plus de 20 nœuds sur les taxiways, l’avion ressemble à un pur-sang qui vibre, oscille ; une douce odeur d’hydraulique et de kérosène remonte à nos narines. Briefing avant décollage : « décollage à la masse de 185 t, en cas de panne moteur ou de panne de deux réchauffes avant V1* : arrêt décollage ».
Check-list avant décollage :
- Take off monitor Armé
- Paramètres décollages Confirmés
- Voyants Engine rating Take-Off
- N1 Limiter Réacteur 4 88 %
- …
- Réchauffes… Reheat Quatre blanches
Check-list avant décollage terminée.
« Air France 001 clear for take-off runway 31 left, Canarsie climb, climb level 300. »
Postcombustion, le supplément d’âme
J’avance les manettes à mi-course pour entraîner les réacteurs. Puis, une fraction de seconde après, et d’un coup sec, j’amène les quatre manettes au tableau. C’est ce claquement qui nous donnera le top et l’allumage de la postcombustion. Les quatre réacteurs déchirent le ciel de Kennedy en libérant leurs soixante-neuf tonnes de poussée. L’officier mécanicien-navigant annonce l’allumage des quatre réchauffes, nous sommes plaqués au siège.
- 100 kt
- V1, à 157 kt
- Rotation, à 200 kt
- V2, à 225 kt
Entre le top décollage et la rotation, il se sera écoulé 35 secondes, soit 2 000 m de roulage. Je tire sur le manche et bloque une assiette de 15° en montée.
- Train sur rentré
À 100 ft, nous basculons l’avion sur la gauche à 40° d’inclinaison pour suivre la courbe de la Canarsie Climb, une trajectoire antibruit, la vitesse est déjà de 230 kt. Si nous n’inclinons pas suffisamment, nous ne pourrions pas respecter la procédure. La puissance et le vacarme des quatre Olympus 593 se réverbèrent sur l’eau avant de nous revenir dans le poste. Cela nous envahit de la tête aux pieds, c’est l’ivresse de la postcombustion. Ceux qui ont fait l’expérience de se mettre sous la trajectoire du Concorde pendant la montée initiale connaissent cette émotion : tout tremble, vibre, les brindilles d’herbe, l’air, tout notre corps entre en résonance, on se sent transportés par quelque chose d’immense et qui nous dépasse. Moins d’une minute après décollage les réchauffes sont coupées, l’auto-manette enclenchée. Nez à 1°, nez à 0°, et enfin la visière est rentrée ce qui entraîne un écoulement laminaire : le bruit s’arrête, le silence s’installe, l’avion file et « monte aux rampes invisibles pour gagner sa hauteur* » Aucun arrêt intermédiaire entre le décollage et le niveau 300. À quinze nautiques du terrain, Kennedy nous autorise à accélérer vers 380 kt, c’est la vitesse de consommation minimum ! *Saint-John Perse, Oiseaux, 1re édition 1962.
À pleine charge, 185 t, Concorde mettra cinq minutes pour atteindre le niveau 300 avec un vario moyen de 7 000 ft/mn ; le domaine de vol du Concorde est fait de telle manière que le passage du Mach s’effectue vers ce niveau. Si nous survolons la terre nous maintenons Mach 0,95 pour ne pas « banguer ». À New York nous sommes autorisés à passer le Mach en continu et en montée.
Le Dieu du Mach
À Mach 0,95, nous remettons la postcombustion car il faut passer au plus vite au travers de la zone transsonique, entre Mach 0,95 et Mach 1,7, où une traînée transsonique se rajoute à la traînée classique. C’est cette zone de traînée très importante qui a été « le mur du son » sur lequel on s’est heurté pendant des années jusqu’à ce que Chuck Yeager le franchisse en 1947.
Check-list accélération transsonique :
- Secondary air doors Vérifié Open
- Voyants Loi E Four High Manettes de poussée Plein avant Réchauffes Reheat
Le pilotage se fait en manuel car à Mach 1 il y a pendant un court instant une inversion des commandes, on passe des lois subsoniques aux lois supersoniques, qui ne sont pas du tout les mêmes : l’effet Venturi est inversé, le centre de poussée doit être déplacé, l’OMN transfère le carburant vers l’arrière de l’appareil (59 %) pour récupérer un avion pilotable en supersonique. Le miracle, c’est que la souplesse et la précision du pilotage sont égales quelle que soit la phase de vol ; les ingénieurs ont fait un travail d’orfèvre. Le pilotage se fera en manuel jusqu’à Mach 1,7, aucune instabi- lité, l’avion grimpe dans le silence de l’azur.
- Mach 1,15 niveau 340
- Mach 1,4 niveau 390
- Mach 1,7 niveau 430
Coupure des réchauffes, check-list croisière supersonique :
- Mach 1,95 niveau 410
- Mach 2 niveau 500
New York Oceanic :
- « Air France 001, clear to Paris Charles de Gaulle via track Sierra Oscar, Mach 2,02, block altitude 500/600. »
Il existe deux tracks supersoniques vers l’est sur l’Atlantique nord : Sierra Oscar et Sierra November, un pour Air France, un pour British Airways, en fonction de l’heure de décollage. En approchant le niveau 500, nous sommes parallèles aux tracks subsoniques, où se trouve un Boeing de British Airways, qui nous contacte sur la fréquence :
- Hey, Air France Concorde 001, what’s your ground speed ?
Nous regardons nos instruments :
- One thousand two hundreds and ninety knots [soit 2 300 km/h]. Sa réponse fuse :
- Unbelievable !
Vingt ans après, je me souviens encore de notre vitesse et de cette réponse du British, « Unbelievable ! » Car, finalement, s’il n’y avait qu’un mot pour qualifier le Concorde, ce serait celui-là : incroyable en tout.
Entre le niveau 500 et le niveau 600, l’air est laminaire, aucune turbulence ou nébulosité : ça ne bouge que lorsqu’il y a un changement de masse d’air. Concorde ne peut pas tenir un niveau de vol fixe à Mach 2 car cela nécessiterait des variations de poussée, via de nouveaux réglages des entrées d’air trop compliqués à gérer. Le vol se fait à pleine poussée – priorité vitesse – à Mach 2,02 et nous laissons l’avion descendre ou monter en fonction du délestage et de la température extérieure. La seule limitation est la température d’impact maximale en opérations (TMO) : au-delà de 128 °C de température coque on doit réduire le Mach, car l’alliage spécial d’aluminium AU2GN conçu pour le Concorde autorise une dilatation réversible de l’avion qui va s’allonger de 25 cm. Au-delà de 128 °C, la dilatation ne serait plus réversible.
Au niveau 550, l’avion consomme 23 tonnes de carburant à l’heure, soit 17 litres aux 100 kilomètres par passager ! Le record de la traversée New York-Paris est de trois heures ; à l’époque où on ne passait pas sur Guernesey, on pouvait maintenir Mach 2 plus longtemps. Concorde a été conçu pour donner le meilleur de lui-même dans la stratosphère, entre les niveaux 400 et 600. À ces altitudes, c’est presque un autre monde ; vers le niveau 600, on aperçoit déjà la courbure de la Terre, le ciel perd sa couleur bleue intense pour un violet indéfinissable qui marque la raréfaction de l’atmosphère. Dans l’autre sens, le Paris-New York, c’est une course contre le Soleil. Nous décollons à 10 h 30 de Paris, pour nous poser à 8 h 30 à New York. La trace du Soleil se déplace à 1 800 km/h à la surface de la Terre, Concorde à 500 km/h de plus. Sa musique est une flèche qui monte vers le Soleil.
Une symphonie stratosphérique
Sur Concorde, l’officier mécanicien a un rôle majeur : il pilote littéralement les attelages moteurs avec une attention particulière aux entrées d’air qui ont pour rôle de réduire la vitesse de l’air arrivant à 2 000 km/h vers une vitesse subsonique en moins de 5 m pour entrer dans la chambre de combustion, un vrai tour de force. Son rôle est également crucial pour les transferts de carburant qui assurent une égale manœuvrabilité en supersonique et en subsonique. L’OMN, c’est le chef d’orchestre qui dirige une symphonie technologique en Mach majeur ! L’avion glisse dans la stratosphère, le temps rétrécit, on a parfois la sensation d’être dans un autre plan de la réalité, où les lois aérodynamiques changent, où le ciel vire au violet, où l’on n’est pas loin de sortir de l’atmosphère. Un sentiment d’absolu, l’impression d’être un peu ailleurs que sur cette Terre, ou de n’y être presque plus.
40° West, Gander Oceanic, 30° West, Shanwick Oceanic, 20° West,
C’est presque déjà la Bretagne !
8° West :
- Brest contrôle, Air France 001, bonjour, niveau 580, Mach 2
- Air France 001, bonjour, autorisé GUR, INGOR, accepteriez-vous qu’un avion de Landivisiau vous accompagne ?
Un même sourire éclaire nos trois visages, et c’est un « Oui, bien sûr » que nous renvoyons vers Brest pour cette rencontre inespérée. Nous entamons la réduction car il faudra être en subsonique au moment du survol de Guernesey. Check-list décélération :
- Manettes de poussée Repères 18/24° Mach 1,6 FL 550
- Manettes de poussée Repères 34° Voyant Engine rating Climb
- Transfert avant Vers 55 % Mach 1,3
- Ramp & Spills Doors 0 %
Nous sommes à Mach 1,3 quand le chasseur nous contacte sur la fréquence. Nous nous coordonnons sur la fréquence 123,45 MHz et, enfin, nous le voyons se rapprocher ; les passagers sont prévenus. C’est un moment unique, quelque chose auquel on n’aurait jamais cru, un moment hors du temps. Le chasseur nous demande de réduire à Mach 0,95, car pour maintenir le vol en patrouille, c’est plus facile pour lui sans la postcombustion. S’ensuit un ballet qui durera cinq minutes d’une grande intensité. Le chasseur se positionne à droite, en dessous, à gauche… pour terminer par un virage de dégagement magistral. Magique et inoubliable.
Un fabuleux Phoenix
Voilà Deauville, nous nous préparons à une descente continue, 380 kt jusqu’au FL 100. Check-list approche intermédiaire, visière baissée, nez à 5°, pour voir ce qu’il y a en dessous. Concorde n’a pas d’empennage horizontal, ni de volets ; tout est remplacé par l’aile delta et les élevons qui y sont placés. La forme de l’aile donne à l’avion une stabilité impressionnante : dans les basses couches, l’avion est quasi insensible aux turbulences, pour le vent de travers, une fois la dérive installée, l’avion ne bouge plus. La manœuvrabilité est exceptionnelle. En vol hors-ligne, l’essentiel des cinq heures de tours de piste est consacré aux circuits basse altitude, dont la maîtrise doit être parfaite, s’il y avait par exemple la nécessité de remettre les gaz à New York avec une attente réduite.
Nous arrivons en finale à 4 000 ft, objectif 210 kt à 1 000 ft et 160 kt à 500 ft stabilisé, c’est l’approche à consommation minimale. Dès que l’on réduit, l’avion freine, car nous sommes au second régime. Concorde est accroché à ses quatre Olympus avec un régime compresseur N2 supérieur à 80 %. À 160 kt, notre assiette est de 11° et le nez est descendu à 12° pour que nous puissions voir la piste. Nous pilotons à l’incidencemètre et à l’assiette. À ce moment du vol, Concorde n’est presque plus un avion, il est devenu un animal, un fabuleux oiseau mythique qui respire par tous les pores de sa flamboyante mécanique, qui vibre et réagit à la plus infime sollicitation des pilotes, agile, souple et puissant. L’officier mécanicien annonce la radio-sonde : « 100 ft – 60 ft – 40 ft – 30 ft – 20 ft – 10 ft. »
Au fur et à mesure que l’on se rapproche du sol, un coussin d’air se forme sous l’aile delta, c’est l’effet de sol, qui tend à faire basculer le nez vers l’avant ; nous devons tirer sur le manche pour contrer ce basculement. L’objectif étant de garder une assiette à 11°, pas plus, car à 13° ce sont les tuyères qui toucheraient le sol. Une fois cette technique du coussin d’air sous « l’oiseau » maîtrisée, Concorde effectue les atterrissages les plus onctueux qui soient. Le freinage au sol est puissant grâce aux performances des freins carbone. Nous nous posons en moins de 1 500 m.
Une part d’absolu
L’avion roule maintenant sur les taxiways, comme l’eau coule dans une rivière. Partout, aux abords des taxiways, des enfants, leurs parents admirent le Concorde. Certains sont même là avec des banderoles, car il faut le dire, en cette fin mai 2003, nous faisons un des derniers vols commerciaux du Concorde, ce sont des centaines de personnes rassemblées pour vivre ce moment unique. Nous sommes sur le taxiway Foxtrot, nous arrêtons l’avion, réacteurs tournants, pour saluer les spectateurs, sortons les drapeaux par les fenêtres ouvertes du cockpit.
Il y a dans l’air un petit air de « Fête de la Fédération ». Dans cette ferveur, il y a sans doute le sentiment inconscient qu’une époque se termine où la création, l’innovation et la vision l’emportaient sur les lois de l’économie. Concorde est un rêve qui aura porté des millions de personnes pendant une trentaine d’années. Il reste l’un des marqueurs d’une époque où tout semblait possible et ouvert. Sa trace est étincelante. Vingt ans après, il a toujours dix ans d’avance. Hormis lui, aucun avion n’a jamais pu traverser l’Atlantique d’une traite en supersonique. Concorde reste un avion inégalé en tout point, il porte en lui cette part d’absolu vers lequel tend l’homme sans jamais l’atteindre. Cette beauté et ce panache ne cesseront pas d’être.
L’AÉRO-CLUB
Pour moi, le voyage aérien a commencé à l’Aéro-club d’Ille-et-Vilaine. À dix-sept ans, le club était la fabrique des rêves, la découverte d’une nouvelle dimension, la promesse de voyages et de découvertes sans limites, le pur plaisir de voler, un autre monde.
Les premiers vols sur un Piper Cub quand le rêve devient réalité. Et ce sentiment de vivre pleinement ce qu’on a imaginé la veille. L’aéro-club est ce qui élargit le champ des possibles, nous conduit sans cesse vers de nouveaux horizons. Je me souviens de ce jour du lâcher sur Piper, le lâcher, toujours inattendu, inespéré, une espèce de petite renaissance et, quand on pose à nouveau le pied sur le sol, ce sentiment de n’être plus tout à fait le même.
Quelque temps après mon brevet de pilote, j’eus la grande chance de faire le tour de France aérien. Quel sublime voyage que de faire à vingt ans le tour de la France, d’aller de ville en ville et vivre pendant quelques semaines une aventure aéronautique et humaine, à travers l’amitié et le compagnonnage de dizaines d’autres pilotes. Le tour de France aérien, c’est presque le tour de France des compagnons du devoir. À chaque étape une leçon d’aviation, comment apprendre de ses erreurs. Une classe de travaux pra- tiques à ciel ouvert. Un accélérateur de formation. On ne mesure pas sa chance à vingt ans de faire un tel voyage. On le mesure après, on y repense, on le revit, comme un rêve éveillé. Et on n’oublie pas dans cette jeunesse, les instructeurs, les amis, la fraternité ; tout cela reste gravé à jamais. C’est le premier bagage pour le grand voyage qu’est la vie d’adulte, le premier cadeau et peut-être le meilleur.
L’aéro-club, c’est ce qui donne la force et l’enthousiasme pour aller plus loin. Concorde, c’est l’avion qui a donné à l’homme une audace nouvelle. S’il y a un fil qui relie l’aéro-club et le Concorde, c’est bien l’enthousiasme. Rien sur le Concorde ne peut se faire sans enthousiasme, il faut être partant et plein d’espérance, comme quand on débute à l’aéro-club ! Concorde, c’est une qualification qui dure cinq mois, cent vingt heures de simulateur, cinq heures de tour de piste ! Il faut connaître l’avion sur le bout des doigts, tout anticiper, aller à l’essentiel : la trajectoire, la vitesse, la puissance, avoir toujours un coup d’avance, et surtout savoir se débarrasser de ce qui est accessoire. Aller à l’essentiel, ne pas se perdre dans les détails : à 2 200 km/h, il n’y a plus de place pour l’accessoire. Concorde, c’est presque une leçon de vie. Tout ce que nous ont appris nos instructeurs d’aéro-club prend alors son sens.
PARCOURS
Après l’ENAC, j’ai volé pour Aviation Sans Frontières au Soudan sur Islander BN-2. J’ai exercé ensuite comme instructeur à l’aéro-club Hispano-Suiza, avant de rentrer à Air France : aéropostale de nuit sur Fokker F27, pendant trois ans, Boeing 747 classique pendant dix ans. En 2000, je fais la 1re qualification Concorde après l’accident. Je vole aujourd’hui sur Boeing 777 après avoir effectué une dizaine d’années d’instruction, ainsi que le lancement du Boeing 787 à Air France.
François ADIBI
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