Voici un récit très instructif de Dan, merci à lui.
Il y a de cela 20 ans alors que j’étais instructeur planeur j’emmenais l’amie d’un pilote en vol sur la campagne. Celle-ci baignait dans le milieu aéronautique sans forcément en connaitre les rudiments de fonctionnement. Après 4 heures de promenade et trop optimiste sur la durée de convection, je me retrouve plus bas que d’habitude (600 mètre sol), après avoir manqué 3 ascendances qui m’auraient permis d’au moins me maintenir pour faire le point. Un virage à gauche, un virage à droite dans la descendance pour me retrouver sans trop m’y attendre à 450 mètre sol, hauteur à laquelle je me résous sans hésitation à me poser dans un champ.
A partir de ce moment tout s’accélère et je passe derrière la machine. Non par manque d’expérience ( 2500 heures et de nombreuses vaches dans les champs ), non par manque d’analyse mais uniquement en raison de la pression temporelle qui m’a écrasé et que je n’ai pas anticipé. Il a du se passer 2 minutes en tout depuis le moment où tout allait bien et maintenant.
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Je pousse encore un peu sur le manche dans une descendance à 300 m et toujours pas de champs choisi pour me poser. J’ai un train d’atterrissage à faire sortir par la passagère en place avant et un déballastage de 60 litres d’eau également à faire faire par la passagère insufisemment aguerri.
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Surcharge de travail. Je dois réfléchir pour deux et trop vite , ma mémoire vive commence à saturer , ma mémoire de travail ralentit . En mème temps, que je suis envahi par une sorte de torpeur, que je ne distingue plus les couleurs, et que je me sens m’enfermer sur moi même, je ressens ma tête tomber par une sorte de relachement musculaire. Mon regard est projeté vers le bas dans l’axe de mes genoux que je vois trembler comme dans une situation qui ne me concerne plus.
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Je reprends conscience d’un coup sans connaitre la durée de ce passage à vide. Je choisis un champ immédiatement face au vent, fait faire calmement les manoeuvres cités plus haut à ma passagère qui n’a rien remarqué, applique une procédure de prise de terrain dans les règles et manoeuvre le planeur comme je conduirai un vélo. Je sens mon cerveau pédaler à toute vitesse en me sentant invulnérable et prêt à affronter une situation même plus compliquée. L’adrénaline a du arriver d’un coup : en étape de base je me vois, par une sorte de projection mentale, sorti du planeur au sol en train de discuter tranquillement avec ma passagère.
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Depuis cet évènement je m’efforce de ne plus voler avec le planeur mais au moins 20 kilomètres devant lui ou avec un quart d’heure d’avance et je me méfie des circuits électriques du cerveau qui ne demandent qu’à dysjoncter !
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Dan.
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Crédit photo (article): Marko Georgiev
Bons vols
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