FORMATION, INSTRUCTEUR

Une formation qui prend en compte l’environnement

Mentalpilote A62

Si le pilote apprend à maîtriser son appareil, les programmes d’instruction accordent peu de place à la maîtrise de son environnement. Breveté il se retrouve confronté à des situations très variées, exigeantes, parfois trop…! Beaucoup d’accidents ont pour origine une perte de contrôle de la situation, la perte de contrôle de l’appareil n’étant que la conséquence d’une situation environnementale non maîtrisée. Il faut donc apprendre à nos élèves à maîtriser son environnement.

Pour y parvenir, il existe un concept d’instruction, et des techniques, qui visent la perception, la compréhension, et la maîtrise de ces situations. L’objectif, c’est l’acquisition par le pilote de compétences qui lui permettront de s’adapter aux différents contextes qu’il découvrira par la suite.

Lorsque vous partez en vol avec votre élève vous prenez en charge en grande partie la gestion de l’environnement. L’autre concept consiste à demander à son élève de prendre en compte l’environnement de son avion et de le gérer dès les premiers vols. Il se dirigera vers une zone précise de travail que vous lui aurez auparavant définie, qu’il devra respecter une fois sur zone (en fonction de sa disponibilité). En termes d’objectifs pédagogiques ; l’objectif principal c’est la maîtrise de l’ensemble du vol. Vous devez trouvez l’équilibre chez votre élève entre la gestion de l’environnement et les objectifs particuliers de la séance (en début de progression c’est vous qui allez gérer la plus grande partie du vol).

Dans cette prise en compte de l’environnement par l’élève, vous allez : le solliciter sur le pourquoi de telle ou telle option, le conseiller, le conforter, lui suggérer… en apportant les connaissances pertinentes nécessaires à la situation (perception, compréhension, décision).

  1. L’élève : «  je vais rejoindre le point d’entrée depuis ma position et ensuite je demanderai l’intégration en longue finale ».
  2. L’instructeur : «  Ta décision est cohérente, par contre tu as entendu l’avion qui arrive ? C’est un vol IFR, il sera prioritaire sur nous. Comment vois-tu les choses ? »
  3. L’élève : « Effectivement, et bien je vais demander dès maintenant si je peux rejoindre la balise pour me présenter derrière l’avion IFR ».
  4. L’instructeur : « Parfait, c’est une bonne option qui t’assure la séparation et qui sera certainement acceptée par le contrôle ».

Tous les petits détails nécessaires à la compréhension de l’activité sont expliqués. Une bonne partie d’entre eux sont notés en vol : « Tiens, regarde le nuage là-bas », et expliqués au sol : « Le nuage que tu as vu était un nuage de rotor … ».

L’élève doit donc savoir gérer son « repère avion », mais également les interactions avec son « repère externe » : la situation du jour, le contexte particulier, la réalité. Le sujet n’est pas de la navigation qui reste un moyen, mais la prise en compte d’une multitude de petites choses, d’aléas, voir de menaces, qui font la différence entre la théorie et la réalité, entre un accident et son évitement. Il contrôle son avion mais également la situation. Un vol en sécurité, c’est de la gestion des risques qui commence par l’identification des dangers pour pouvoir ensuite les éviter.

Suivant le même processus pédagogique, il existe un moyen de sollicitation du jugement de l’élève efficace, c’est le « Et si … ? ». Et si l’avion fait un tour d’attente ? Et si nous n’étions pas en VFR spécial ? Et si le plafond n’était que de 1500 ft ? Ce  « Et si … ? » doit être pensé en fonction de ce que vous recherchez à développer chez votre élève. Cela peut aller du plus simple au plus compliqué :

  • Vérifier une connaissance particulière : « Et si le jaugeur est en panne».
  • Vérifier le bon sens : «  Et si l’orage est sur le terrain à notre retour », qui appelle une réponse évidente.
  • Éduquer le jugement : « Et si tu t’égares ? » (questions ouvertes).

Ce dernier cas est celui qui va vous permettre de guider (former) votre élève vers la bonne décision en lui donnant les connaissances essentielles liées à la situation : « Tu as un transpondeur, quelqu’un peut-il te repérer avec son radar ? ». Vous pouvez l’aider à soupeser les différentes options en mettant en balance le poids des conséquences : « Effectivement, c’est un terrain militaire fermé à la CAP, mais s’il ne te reste plus que 30 mn de vol, qu’est-ce qui te semble être le plus sûr ? ». Pour solliciter ce jugement, si la question est plutôt ouverte, il faut également démontrer à son élève que dans beaucoup de situations, il n’y a pas toujours une réponse qui s’impose. La dynamique du vol, et le nombre de ses composantes ne peuvent pas être mises en équations. Les solutions ne sont pas toujours évidentes, votre élève doit le savoir (c’est une des caractéristique de la complexité du vol).

Les variations de ces mises en situation sont multiples, c’est à vous de décider de leur pertinence et de leur cohérence en fonction de votre élève et du contexte :

  • Certaines peuvent être utilisées quelque soit le vol ;
  • D’autres devront s’adapter aux conditions du jour ;
  • Ou bien vous vous servirez des conditions du jour pour un scénario qui s’y prête ;
  • Ou il n’y a plus de mise en situation, le contexte étant suffisant pour ne pas en rajouter !
  • Vous connaissez des situations particulières liées à votre environnement que votre élève risque de rencontrer : une instruction du contrôle dans telle situation particulière, des rabattants dans la vent arrière par vent d’Est … Vous l’avez prévenu : « Et si ». Beaucoup d’entre-elles peuvent être abordées au sol, même si leur contextualisation dans la réalité sera pédagogiquement beaucoup plus efficace.

De nombreux instructeurs utilisent déjà cette approche de la formation qui vise la maîtrise de son environnement. Ce qui est nouveau c’est que c’est devenu une philosophie avec son processus qui a la particularité d’être utilisé de manière systématique dans tous les vols (avec ses programmes).

Il est relatif à de la gestion des risques, qui renvoie à une « cartographie des risques ». Nous venons d’évoquer les risques liés à la maîtrise de l’environnement, dont certains risques locaux ; il y en a beaucoup d’autres. Chaque activité possède sa propre cartographie. Mais d’une manière générale, en aviation légère, le risque principal c’est de se retrouver dans une situation pour laquelle on n’a pas été préparé. Cela donne des pistes sur les objectifs qui se focaliseront sur les capacités du pilote à percevoir son « enveloppe de vol » personnelle et à s’y maintenir par la connaissances des dangers et leur anticipation : faible visibilité, plateforme encombrée, utilisation d’un moyen radio inconnu (GPS), zone géographique particulière (zones, montagne, survol de la mer…), piste courte …

Breveté, il va être confronté à de nombreuses « première fois ». Il devra alors être capable de les percevoir, de les analyser et de prendre la décision qui s’impose. Cette compétence est essentielle chez le pilote, elle s’éduque.

« A l’issue de sa formation le pilote sera capable de faire face à une situation qu’il n’a jamais rencontrée ou de résoudre un problème qu’il n’a jamais vu auparavant ». Cette phrase décrit un des objectifs de la formation d’un pilote dans un programme basé sur cette philosophie.

*Cette approche de la formation n’est pas nouvelle pour certains d’entre-vous, cette prise en compte de l’environnement très tôt dans le cursus a fait son apparition à la fin des années 80. Ce qui a évolué depuis c’est l’importance  donnée à cette gestion des risques, avec l’apparition d’un processus de formation spécifique en aviation légère.

Bons vols

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