Un article précédent décrivait le traitement par nos médias des évènements aériens sur fond de peur, de sensationnalisme, de catastrophes évitées de peu. Les évènements aériens permettent en effet de tirer la plupart des ficelles de la presse people pour attirer le lecteur.
Voici un extrait d’un article du journal Ouest-France suivi par quelques infos complémentaires (les décodeurs de l’info) :
Un avion Delta Airlines décroche de 9 000 mètres en quelques minutes
Les passagers à bord ont vécu plusieurs minutes d’angoisse avant de retrouver la terre ferme, sans dommage. Les passagers d’un vol Delta Airlines 2253 ont eu une terrible frayeur, mercredi 18 septembre. L’avion qui les conduisait d’Atlanta à Fort Lauderdale (États-Unis) a effectué un décrochage brutal de 30 000 pieds, soit 9 000 mètres, en environ huit minutes,
« Que le capitaine et l’équipage soient bénis, s’exclame un autre passager sur Twitter. J’ai envoyé un texto à ma femme et à mon père pour leur dire que je les aimais. J’ai dit à ma mère que je l’aimais et j’ai serré mon fils très fort. »
« Les masques à oxygène sont tombés », a déclaré Harris Dewoskin, un passager présent à bord, à WSB. Selon lui, le personnel a fait une annonce demandant aux gens de ne pas paniquer. Un message sans grand effet. « Beaucoup de gens autour de moi se sont mis à hyperventiler, à respirer très fort, poursuit Harris Dewoskin. La vie est fragile. Pendant environ 60 ou 90 secondes, nous ne savions vraiment pas ce qu’il se passait. »
L’article est illustré par quelques photos, avec des passagers au milieu des masques à oxygène qui sont descendus, ainsi qu’un homme qui embrasse son enfant.
Les décodeurs de l’info
Après quelques recherches, il s’avère que ce Boeing 767 avait une fuite de pressurisation, l’altitude de la cabine s’est mise à monter. L’équipage a donc décidé d’effectuer une descente rapide avant que l’altitude cabine ne passe les 10 000 ft, un seuil qui entraîne la descente des masques dans la cabine des passagers. Or, appareil ancien, l’altitude cabine en croisière du 767, proche de 7000 ft, est assez haute. Il n’est pas précisé à quelle altitude (extérieure) au cours de la descente la cabine a atteint les 10 000 ft. Elle devait être sans doute assez proche de ce niveau dans la mesure où l’équipage, en connaissant le vario cabine (la vitesse de montée de la cabine), pensait pouvoir atteindre les 10 000 ft extérieur avant que la cabine n’atteigne cette même altitude. Si vous voulez en savoir plus sur la pressurisation, voici un autre récit.
En conclusion, physiologiquement les passagers sont passés de 7000 ft à 10 000 ft, ou un peu plus pendant un court instant, limite à partir de laquelle un apport d’oxygène est requis (éventuellement via la pressurisation). L’hyperventilation de certains passagers était donc la conséquence d’un stress et non pas d’une hypoxie. L’équipage a appliqué la procédure et à aucun moment le niveau de sécurité du vol n’a été dégradé. Nous sommes proche d’un non évènement.
Ces aspects factuels, que vous pouvez trouver (ainsi que les journalistes) en quelques minutes sur Internet, qui relativisent grandement l’importance de cet évènement ne sont à aucun moment abordés. Bien au contraire, la descente se transforme en décrochage brutal, avec une frayeur à bord, et des passagers qui vivent leurs derniers moments.
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*Dans le cas présent, l’attention des lecteurs.
Crédit photo (canard) : Peter Camyre 2015
Bons vols